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Le sombre scénario décrit par Péroline
mise en ligne le vendredi 10 août 2001

9 heures, hier matin. Vêtue de son éternel pull marine - un cadeau de Stéphane - Péroline arrive sous bonne escorte au palais de justice de Sarreguemines, où le juge l’a convoquée "en urgence" après ses déclarations chocs recueillies la veille au soir par les enquêteurs, qui l’entendaient alors pour la quatrième fois, depuis le début de l’affaire.


Moins de deux heures plus tard, la jeune maman quitte le tribunal, "vidée mais soulagée", selon sa propre expression. Comme prévu, l’audition est accablante pour son petit ami. Nourri des indications que Krauth lui aurait données "au fil des jours", jusqu’à son arrestation le mardi 31 juillet au domicile mulhousien du couple, le récit glace les sangs. Péroline affirme que Karine était "vivante" lorsque Stéphane l’a embarquée dans sa Mazda 323, après l’avoir percutée sur cette petite route sinueuse qui relie la zone artisanale et l’entrée de "Bitche Camp". Péroline dit "bien connaître" ce chemin où son ami la "faisait parfois conduire". Au juge d’instruction, elle aurait expliqué en substance : "Stéphane m’a dit que Karine était prise de convulsions mais vivante, quand il l’a embarquée. Durant le trajet, elle n’a pas arrêté d’implorer Stéph’ pour qu’il la ramène chez ses parents. Arrivé en forêt de Mouterhouse, il l’a sortie de la voiture. Je pense qu’il l’a violée. Ça ne m’étonnerait pas, il a tenté plusieurs fois de m’imposer des rapports alors que je voulais pas. D’ailleurs, le pantalon de Karine était à moitié baissé, lorsqu’on l’a retrouvée".

"Etranglée avec la lanière de son sac à dos"

Comment Péroline a-t-elle pu avoir connaissance de ce détail, effectivement relevé par le médecin-légiste ? Mystère. La jeune femme évoque aussi une "boîte de préservatifs" retrouvée "entamée" dans la boîte à gants de la Mazda. Toujours selon elle, Krauth lui aurait avoué avoir "étranglé ensuite la fille" avec la lanière de son sac à dos, avant de brûler son corps sans vie. "Il s’est débarrassé de ses papiers dans la benne à ordure du magasin Match, a jeté ses baskets dans le lac [l’étang de Hasselfurth, NDLR], brûlé ses vêtements et enterré ses bijoux. Je peux même vous montrer l’endroit où ils sont", a-t-elle suggéré, après s’être rendue la veille au soir sur les lieux avec les gendarmes, afin de leur indiquer effectivement l’endroit où la dépouille de Karine avait été retrouvée. Mais de bijoux, les gendarmes n’ont pas retrouvé la trace, hier soir.

Comment Karine pouvait-elle être à ce point précise sur ces lieux, rien ne ressemblant plus à un chemin forestier qu’un autre chemin forestier ? "Je connais bien le secteur, on allait parfois avec Stéphane pour faire des câlins", explique-t-elle. Le juge lui propose alors une confrontation avec son concubin. Elle refuse. "Je suis trop mal". Le magistrat lui redemande comment Stéphane a-t-il pu lui confier un secret aussi funeste. "Peu de temps avant que les gendarmes ne viennent le chercher, il m’a dit qu’il préférait me l’apprendre plutôt que je l’apprenne par quelqu’un d’autre", affirme la jeune maman. Contactée l’après-midi même par le Républicain Lorrain, Péroline chargeait la mule, faisant état cette fois d’un inquiétant paquetage dans lequel Krauth aurait enfoui pêle-mêle, avant de partir pour Bitche, la bombe lacrymogène qu’il lui avait offerte à la suite d’une agression mais aussi "une pelle et un électrochoc". Elle ne le dit pas aussi abruptement mais cet attirail de choc tend à accréditer la thèse d’une "chasse programmée". "Il m’a même emprunté une paire de baskets noires pour qu’on ne reconnaisse pas ses pas", précise-t-elle. Autant d’assertions dont les enquêteurs déclaraient hier soir ne jamais avoir entendu parler.

"Ce fut pour lui un choc terrible"

Cette déposition accablante à peine terminée, Me Martial Gagneux, avocat de Stéphane Krauth, force la porte du juge Raffray et demande à consulter le procès-verbal d’audition. En fin de matinée, il fonce à la maison d’arrêt avec "le PV et le Républicain Lorrain sous le bras", afin d’aviser son client de la gravité des accusations portées contre lui par sa petite amie. "Ce fut pour lui un choc terrible", relate alors Me Gagneux. Krauth, qui devrait être transféré très rapidement dans une autre prison pour des raisons de sécurité, demande aussitôt à être entendu par le juge d’instruction. Le magistrat accepte de le recevoir l’après-midi même. Réponse du berger à la bergère, Krauth enrôle à son tour sa concubine dans son odyssée meurtrière. Ce dimanche 22 juillet, il explique en substance être allé "faire du rallye" sur la zone artisanale : "J’avais bu et fumé [du cannabis, NDLR], après avoir passé la nuit dans ma Mazda, sur un parking. J’avais ramené mon ami Sébastien à Bitche le samedi mais son appart était trop crad (sic) pour que j’y dorme. J’ai pris le virage à 120 km/h. J’ai vu soudain une forme et entendu un choc. Je suis descendu de la voiture, la jeune fille était prise de convulsions. Mon premier réflexe fut de la gazer, pour qu’elle ne me reconnaisse pas et ne puisse pas relever le numéro de ma plaque. Mais finalement, je me suis dit que je ne pouvais pas la laisser comme ça. Au bout de dix minutes de route, je n’ai plus senti son pouls, elle ne respirait plus, son coeur ne battait plus". À ce moment, Krauth perd le fil de son récit, évoquant un "trou noir" et un "mauvais délire". Remis de ses émotions, il appelle Péroline sur son portable, vers 17h30, abandonnant le corps sur place. Arrivé à Mulhouse trois heures plus tard, il se confie à Péroline à l’heure du grand film.

Seconde audition

À son tour, Krauth accuse sa compagne en des termes qui pourraient se résumer ainsi : "Elle m’a dit qu’il fallait y retourner et faire disparaître le corps. Nous avons rempli d’essence plusieurs bouteilles d’eau minérale et j’ai repris le volant. Il était environ 2 heures du matin lorsque nous sommes arrivés sur les lieux, où nous avons brûlé le corps. À l’aube, nous étions de retour à la maison". Krauth raconte qu’il voulait "tout dire" mais que "Péroline [l]’en empêchait".

Ce récit a fait bondir le juge, qui ordonna aussitôt que Péroline fût à nouveau conduite dans son cabinet. À 18h50, la jeune fille entamait un second interrogatoire, après avoir confié son bébé aux parents de l’amie qui a bien voulu la recueillir chez elle à Bitche, ses propres parents étant "en vacances dans le sud". Une heure plus tard, elle ressortait libre du palais de justice.

Pour une fois tous d’accord, les avocats des deux bords (partie civile et défense) ont déclaré dans la soirée attendre les résultats des expertises médico-légales complémentaires avec une "grande impatience". On sait notamment que des prélèvements génétiques sont en cours d’analyse. Me Gagneux réclamait pour sa part une "confrontation dans les meilleurs délais" entre les deux concubins.

 


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