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Le récit poignant d’une mère
mise en ligne le jeudi 21 octobre 2004

Audience poignante, hier, avec l’audition de Fabrice, Roger et Édith Schaaff, le frère aîné et les parents de Karine. Au cinquième jour de leur procès, Stéphane Krauth et Péroline Garino seront entendus aujourd’hui sur les faits.


 
"Ça fait trois ans que je sais que je vais m’adresser à vous et ça fait trois ans que je retourne le texte de mon intervention dans ma tête, du matin au soir et même la nuit. Et je peux vous dire qu’à chaque fois, ce texte est différent..." Tailleur gris et fines lunettes, Édith Schaaff s’accroche à la barre comme à une bouée de sauvetage et entame sa déposition.

Durant plus d’une heure, dans un récit poignant, la maman de Karine va évoquer sa fille, sa vie avec elle et sans elle, et ce deuil qui n’en finit plus d’"ouvrir un gouffre sous [ses] pieds". Elle évoque son mariage, les difficultés que le couple a rencontrées pour avoir des enfants, au début. "Après des mois de traitement, le médecin qui nous suivait, mon mari et moi, nous a dit : "Madame, la science ne peut rien pour vous, vous n’aurez jamais d’enfant". L’été suivant, j’étais enceinte de Fabrice. Ce fut le plus beau des cadeaux ! Karine est née un an et demi plus tard et pour nous, ce fut comme un second miracle. Elle était notre petit bijou. Une enfant espiègle, pleine de vie, tendre, avec un sens inné de la famille".

Souvent, Édith Schaaff fond en sanglots. Des sanglots brusques, violents et saccadés. "C’est vrai que mes enfants, je les ai couvés", se ressaisit-elle. "Je me disais qu’en les protégeant, il ne pourrait rien leur arriver...". Elle se tourne vers les jurés : "Peut-être êtes-vous parents, je ne sais pas... Si c’est le cas, comment réagiriez-vous si ce genre d’affaire vous tombait dessus ?".

"Ils ont tué notre famille"

"C’était un joli petit brin de femme, magnifique de l’intérieur comme de l’extérieur", poursuit-elle en évoquant sa fille. Sans lui adresser un regard et sans jamais la nommer, elle évoque Péroline, co-accusée de Stéphane Krauth. "Comment une jeune femme, mère d’un petit bébé [Léa avait trois mois à l’époque des faits] a-t-elle pu, ne serait-ce qu’un instant, suggérer de brûler une gamine de 16 ans ? Pourquoi n’a-t-elle pas pris son bébé sous les bras et ne s’est-elle pas enfuie ?". À nouveau, Karine revient dans son témoignage et les questions se bousculent : "Quel genre de petit copain aurait-elle amené à la maison ? Aurait-elle eu son permis de conduire ? Quelles souffrances lui ont-ils fait subir ?". Puis, s’adressant une fois encore au jury : "Dites-moi pourquoi il a fallu que ça tombe sur ma gamine ? Expliquez-moi comment je dois faire pour ne pas dire que ce sont des monstres ? Si vous pouvez me répondre, ce procès n’aura pas été inutile".

Les visages se ferment, le silence est lourd. "La mort d’un enfant, c’est une tombe que vous irez voir toute votre vie", murmure Mme Schaaff. "Mais il n’y a pas que ça. C’est votre famille qui vole en éclats, votre vie de femme qui est foutue. C’est ne plus savoir communiquer. Vous, votre fils, votre mari, chacun souffre à sa façon et les souffrances sont incompatibles. Ce n’est plus une maison que vous habitez mais des pièces que vous occupez. Il n’y a plus de rire, plus de fête, plus rien...".

Précédant sa maman, Fabrice, le grand frère de la victime, s’était lui aussi tourné vers les jurés : "Depuis le temps que je suis dans cette salle d’audience, je ne sais toujours pas comment est morte ma soeur... La défense va plaider qu’il ne faut pas bousiller la vie d’un garçon de 26 ans. Mais la vie de ma soeur, on ne l’a pas seulement bousillée, on l’a prise ! S’il vous plaît, Madame, Monsieur, quand vous rendrez votre verdict, pensez à vos soeurs, à vos fils, à votre famille... Merci". "Karine était notre soleil. Ils ont tué notre enfant, ils ont tué notre famille, les monstres...", avait auparavant déclaré Roger Schaaff, le père de Karine.

 

Nicolas BASTUCK
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